la question du style en illustration
Créativité

La question du Style en illustration

Je profite de ce début d’année, pour vous souhaiter à tous une belle année 2021 riche en création et épanouissement personnel.
Suite aux résultats du sondage que j’avais effectué sur Instagram avant les vacances de Noël, j’ai donc décidé de vous parler dans mon premier article de l’année de la question du style en illustration.
En effet, s’il est une question qui occupe l’esprit de bon nombre de créatifs, c’est bien celle du style.
Il faut dire que l’enjeu est d’importance. Pour beaucoup, Chercher son style, c’est un peu aller à la recherche de soi-même. C’est une quête de ce qui nous définit, la traduction  de nos goûts, de notre sensibilité graphique, c’est construire un univers qui n’existe pas encore, donner vie à tout un monde , donner naissance, accoucher, presque .
Le projet est donc excitant tout autant qu’angoissant. En effet, aller à la découverte de soi-même est une aventure grisante, passionnante, malheureusement souvent en partie gâchée par la peur de l’échec, la crainte de la déception ou de l’incapacité à aboutir.
Parfois l’ambition peut être trop élevée, entrainant frustration et insatisfaction. parfois l’ambition est trop faible et le résultat décevant.
Une chose est sûre, trouver son style est un travail de construction, pièce par pièce, qui prend du temps.
Souvent, la frustration nait du fait qu’il faut choisir une voie et s’y tenir, ne pas dévier de son chemin, pour ne pas perdre la cohérence, d’où naitra le style. Pas de style sans cohérence. Il faut écrire un langage et s’y tenir. Décliner ce langage dans un dictionnaire d’images. Choisir un ou plusieurs médiums combinés, peinture, crayon, découpage…. Chercher comment dessiner nos personnages, quels seront leur caractéristiques, des yeux jusqu’à la pointe des doigts, puis adapter ce langage au design des animaux, aux véhicules et objets divers, la végétation, la ville, les maisons, les paysages .
J’y reviendrai dans un prochain article plus complet sur comment travailler pour trouver son style.
Ce travail requiert de la discipline et du temps. Mais son aboutissement est-il une victoire ou un renoncement ?

1/Trouver son style, mais pourquoi faire 

Trouver son style permet de gagner du temps …donc de l’argent

En effet, choisir un style et s’exprimer à travers ce langage personnel comporte des avantages.
Le premier est qu’il est rassurant pour l’artiste. Ce dernier crée mais dans une zone de confort. Il maîtrise son alphabet et perd moins de temps dans ses recherches graphiques. Il se concentre sur la composition de ses images.

Trouver son style c’est être reconnaissable.

Le deuxième avantage relève du marketing. Pour se faire connaitre des éditeurs, et autres clients, il est préférable de posséder un style facilement identifiable, afin de ne pas être perdu dans la masse des autres illustrateurs. Votre style est alors votre carte d’identité.
On reconnait au premier coup d’œil une illustration de Marion Arbona, d’Isabelle Arsenault ou d’Emmanuelle Houdart.
Sans cela peu de chance d’être identifié dans la masse.

Avoir son propre style est donc vraiment souhaitable quand on veut gagner sa vie en dessinant.
Malheureusement, chaque médaille ayant son revers, le fait de s’exprimer à travers un style très défini peut être délétère.

2/ les revers du style

Etre un artiste n’est décidément pas simple. Artiste et sérénité ne font décidément pas bon ménage. Car en effet, après tant d’efforts déployés pour élaborer et peaufiner ce fichu style, un écueil émerge déjà :

Le style et la mode

Le problème d’un style c’est qu’il est souvent élaboré par rapport à des tendances à un moment donné.
L’illustrateur se nourrit des images qui l’entourent. Il est sensible au style d’autres artistes de son temps, ou d’époques plus anciennes, mais n’échappe pas souvent au « goût du jour ». Ce phénomène est en encore plus évident aujourd’hui avec les réseaux sociaux et autres plateformes destinées aux productions d’artistiques comme « Art Station », par exemple.
Entre Instagram, Pinterest, Art Station et tout le reste, notre culture de l’image est vaste et nous avons assimilé les codes graphiques de notre époque.

Tout allant plus vite aujourd’hui, les codes en vigueur à ce jour, seront bientôt dépassés , puis remplacés par de nouveaux.
Vous voyez donc où je veux en venir ?Ce qui est trop à la mode un jour, sera démodé le lendemain.
D’où cette équation délicate. Comment faire en sorte que notre style qui fera peut être notre succès un certain temps, car il sera perçu comme actuel et « dans le vent » à un temps donné, ne passe pas de mode, ou ne lasse pas au bout d’un moment ?
Une solution s’impose à mon avis. Faire évoluer son style , se renouveler, de manière à être toujours reconnaissable en faisant des choses différentes.Cela peut sembler difficile et il vrai que cette évolution s’avérera souvent déstabilisante tout autant qu’excitante pour son auteur.
Cependant, on constate souvent que le spectateur, lui, saura reconnaitre la sensibilité et la personnalité d’un artiste, malgré l’évolution de son style.
Par ailleurs, la recherche perpétuelle et l’évolution ne sont-elles pas l’essence même de la démarche artistique?

L’Art et le style

Si l’on regarde le travail des plus grands artistes du vingtième siècle comme Picasso ou Matisse, on constate que leur travail n’a cessé d’évoluer au fil du temps. Ils ont passé leur vie à se questionner et à expérimenter de nouvelles formes d’expression graphique. Peut-on trouver des points communs entre une oeuvre de Picasso de la « Période bleue » et « les demoiselles d’Avignon »?
Cette réflexion pointe une fois de plus la délicate question de la frontière entre l’Art, l’Art appliqué et l’artisanat.
Si la notion même d’Artiste, au sens le plus noble, renvoie à une activité créative totalement libre et exempte de toute contrainte quant à la forme et au fond, ce dernier n’étant pas lié à une industrie ou à une entreprise commerciale, l’illustrateur, tout comme l’artisan, travaille pour un client dans le cadre d’une relation commerciale .( voir article 1 sur l’illustration)
Cependant, il serait totalement réducteur de penser que ces rôles sont aussi strictement définis dans la réalité.
En effet, des artistes peuvent recevoir des commandes avec un cahier des charges ou des spécifications qui peuvent venir restreindre ou contraindre leur créativité, à charge pour eux d’accepter ou non ces marchés.Il faut d’ailleurs se rappeler que pendant la plus grande partie de l’histoire de l’humanité, les artistes ne faisaient que produire des commandes qui leur étaient passées par l’Eglise, les souverains ou de riches aristocrates.Seuls les artistes indépendants financièrement grâce à des mécènes ou à une fortune personnelle sont totalement libres de leur création. 

En parallèle l’illustrateur peut disposer d’une liberté artistique plus ou moins étendue en fonction de la façon dont il exerce sa profession. S’il illustre des livres, les éditeurs peuvent attendre de lui qu’il crée des dessins dans le style auquel ils identifient l’illustrateur et ne pas être ouverts au changement car ils savent que le public attend de retrouver ce style qui a fait son succès. L’illustrateur se trouve alors enfermé dans son style et comme nous l’avons dit plus haut risque un jour de lasser.D’autres éditeurs sont plus ouverts à une évolution du style de leurs illustrateur, tant qu’ils penseront que ce dernier peut rencontrer un succès commercial.
Une solution pour l’illustrateur qui souhaite jouir d’une liberté maximale est de rester indépendant. Aujourd’hui les illustrateurs ont la possibilité de produire eux même leurs ouvrages notamment avec une plateforme de crowdfunding, telle que Ulule ou Kickstarter.
J’espère que cette réflexion sur la question du style vous aura été utile. N’hésitez pas à commenter cet article ou à me poser des questions. Echanger avec vous est une grand source de joie pour moi!

Si vous souhaitez aller plus loin, je vous conseille l’excellent podcast SENS CREATIF de Jeremy Clayes, sur ce thème, dans l’épisode 29.

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1 commentaire

  1. Nicole D a dit :

    Très bon article Nadia. Pour moi, découvrir son style, c’est presque l’apprivoiser, se dire comme d’un vêtement qu’il me va bien, que j’y retrouve ma personnalité, que j’ai envie de poursuivre dans cette direction. En tout cas, le tien est reconnaissable entre tous!

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